Ce que j’aurais dit...

Elizabeth May
Comme vous pouvez très bien l’imaginer, j’ai reçu des centaines de courriels d’électeurs et d’électrices, de membres ainsi que de Canadiens et de Canadiennes depuis le Congrès de mon parti dimanche dernier. Les courriels couvraient pratiquement tous les angles concevables au sujet de la nouvelle position du parti sur le mouvement BDS.
 
Je n’ai pas eu suffisamment de temps lors du Congrès pour exprimer ma position sur cette question très controversée. Toutefois, l’une de mes répliques – dans ce cas à un membre qui s’inquiète de mon opposition à la nouvelle politique – résume vraiment ce que j’aurais dit dimanche dernier.
 
J’espère que tous les membres prendront quelques minutes pour lire ceci et réfléchir à nos prochaines étapes comme parti au cours des prochains jours.


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Cher David,
 
Je veux vous expliquer plus clairement la raison pour laquelle je me suis opposée à la résolution BDS. Évidemment, je ne condamne pas les gens qui font partie du mouvement BDS. En fait, je parraine une pétition qui vise à renverser le vote de la Chambre des communes pour diaboliser le mouvement lui-même.
 
Ma préoccupation est que ceci est une question très controversée et, que cela soit juste ou non, qu’elle est perçue comme anti-Israël et antisémite. Le degré auquel elle sème la controverse est très clair quand on regarde ce qu’elle vient de faire à notre parti.
 
La critique des actions de Netanyahu est appropriée. En fait, je suis la seule chef de parti qui a critiqué la réaction excessive de Netanyahu en bombardant Gaza en 2014. La demande d’accorder des droits aux Palestiniens est appropriée. On retrouve tout ceci dans la politique existante du PVC. L’appui à une série de tactiques d’un mouvement social n’est pas quelque chose que fait un parti politique. Par exemple, nous pouvons réclamer une solution à deux États et exiger qu’Israël cesse son expansion illégale dans les territoires occupés. Nous n’avons pas besoin d’appuyer une série particulière de slogans et de demandes d’un mouvement qui n’est pas un parti politique et dont les demandes n’ont aucun sens pour un parti qui cherche des solutions que le gouvernement du Canada peut apporter.
 
Malheureusement, le débat s’est tenu sous de nouvelles règles, celles des Roberts Rules of Order. Si nous avions suivi notre pratique habituelle et reconnue de décisions fondées sur le consensus, cette résolution n’aurait jamais été adoptée. Elle était trop controversée. Nous aurions trouvé un compromis.
 
De même, en raison d’un malentendu, mon microphone a été coupé après 90 secondes lors de ma seule intervention. Ce que je voulais faire quand mon microphone a été coupé était d’appuyer l’appel des membres retraités des forces de sécurité israéliennes. Ce nouveau groupe, Security First, défie Netanyahu. Il réclame que l’on cesse l’expansion illégale en faisant valoir que cela rend Israël moins sécuritaire. Il est beaucoup plus intelligent et cela sera beaucoup plus efficace de soutenir les demandes de retraités de la défense israélienne et de membres du Mossad que les demandes similaires d’un groupe extérieur, BDS.
 
La gamme des  options visant à faire respecter la loi internationale par Israël pourrait inclure des sanctions et des boycottages des consommateurs. En fait, une formulation de ce genre se trouvait dans une modification de compromis que je voulais appuyer. Mais elle a été déclarée irrecevable. Elle nous aurait permis de nous exprimer en nos propres mots, de nous empêcher d’être détournés au profit d’un mouvement d‘une seule cause.
 
Alors pour bien me faire comprendre, je respecte ce que plusieurs personnes qui font partie du mouvement BDS essaient de faire. Et je ne pense pas que le mouvement peut être jugé antisémite, même s’il attire des personnes qui le sont. Il est tout simplement mal avisé de faire d’un mouvement extérieur et très controversé notre politique.
 
Je regarde également ce qui motive les gouvernements à changer, comme Gandhi le faisait - en examinant ce qui sera efficace. Il a dit un jour qu’il savait que la désobéissance civile non violente inciterait les Britanniques à quitter l’Inde parce qu’il savait que cela pourrait leur poser un problème de conscience. Mais il ne pensait pas que cela pourrait fonctionner contre une dictature. Le mouvement de sanctions contre l’Afrique du Sud a fonctionné parce que l’Afrique du Sud était un pays qui avait un passé colonial du Commonwealth. Cela a vraiment blessé les Afrikaners d’Afrique du Sud d’être chassés du Commonwealth. Ils voulaient y être réintégrés. C’était leur « famille ».
 
Israël est entièrement différent. C’est un pays créé sur les cendres d’un génocide innommable. Il se sent entouré d’ennemis. Ses dirigeants et sa population n’ont pas de problème de conscience à utiliser ces tactiques; ils ne se sentent pas exclus et ne veulent pas être acceptés. Ils se sentent agressés et menacés. Cela les replie davantage sur eux-mêmes et érige plus de murs – au sens propre et au sens figuré. Devant un passé de victimisation et de génocide, les sanctions et les boycottages sont perçus par l’ensemble de la communauté juive au Canada, par les verts en Israël et par le gouvernement israélien comme des attaques contre le droit d’Israël d’exister. Cela ne permet pas ni ne fait la promotion du changement. Je suis convaincue que le mouvement BDS ne fera jamais progresser la paix ou les droits palestiniens. Là où nous devrions nous situer comme parti, c’est en nous efforçant de faire la promotion des retraités des forces armées israéliennes, en faisant la promotion d’un plus grand appui du gouvernement canadien aux droits des Palestiniens, en encourageant l’aide et l’assistance au développement. Malheureusement, on ne m’a pas permis de dire tout ceci lors du débat en séance plénière.
 
Vous pouvez continuer à condamner mes opinions, mais vous avec au moins l’avantage de les connaître.
 
- Elizabeth