(OTTAWA) - Les discussions de la COP20 ont cours dans un endroit imprévisible - une base militaire à l’extérieur de la ville. En dépit des rapports faisant état de son empreinte écologique, et ayant été construit à partir de rien pour servir dix mille personnes, cet endroit est idéal. Selon votre point de vue, il pourrait paraître bizarre et inapproprié que la COP soit entourée par des installations militaires d’entraînement.
Aujourd’hui, c’est la première fois que je sors du site de la COP20 pour aller dans les rues de Lima. La marche sur le climat de septembre qui avait mobilisé des centaines de milliers de personnes à travers le monde s’est poursuivie dans les rues de Lima. Les estimations font état d’une foule de 10 000 à 15 000 personnes. Le rassemblement, positif et exubérant, s’est étendu sur plusieurs kilomètres en plein cœur de Lima.
Pendant ce temps, dans l’enceinte de la COP, les négociations du GPD ont aligné plusieurs phrases et dispositions dans des alternatives et des options. Il est difficile d’imaginer comment cette conférence se conclura avec un consensus rédigé avant la levée des travaux vendredi. Demain, je prévois une nuit blanche.
En attendant, le Brésil a lancé des idées intéressantes. La charpente d’une entente est encore débattue. Qu’est-ce que les pays industrialisés qui émettent la majeure partie des émissions dans l’atmosphère devront réduire? (Il faut se rappeler que les « émissions historiques » ne sont pas historiques. La pollution par le carbone a une durée de vie de cent ans. Cette pollution générée par les pays industrialisés est encore beaucoup plus importante dans les concentrations atmosphériques de carbone que celle qui est générée par des puissances aussi polluantes comme la Chine.) Qu’est-ce que les pays à industrialisation rapide comme la Chine et le Brésil devraient assumer?
Le Protocole de Kyoto, basé sur le satisfaisant Protocole de Montréal qui protégeait la couche d’ozone, se fondait sur des responsabilités et des cibles « communes mais différenciées ». Les deux protocoles avaient établi que les pays industrialisés devraient agir en premier sur leurs émissions. De nombreux pays industrialisés ont atteint ou dépassé les cibles de Kyoto. Mais le refus des États-Unis de ratifier le Protocole de Kyoto et le retrait du Canada de ce protocole ont laissé un sentiment de méfiance entre le Nord et le Sud.
La nouvelle proposition du Brésil ouvre les discussions à propos de ces enjeux délicats et insurmontables. La « différenciation concentrique » vise à faire agir les pays industrialisés ensemble avec des réductions réelles globales, alors que les pays émergents (autres que les plus pauvres, appelés les pays les moins avancés ou PMA) agiraient avec des cibles globales basées sur des unités de réduction relatives (ou cibles d’intensité).
On peut imager l’idée précédente comme une série de trois cercles : le cercle le plus petit est composé de pays industrialisés avec des cibles de réduction absolue globales; le cercle autour de ce premier cercle comprend des pays à l’industrialisation rapide souvent appelés économies émergentes avec des cibles d’intensité par personne ou des cibles de réduction relatives; enfin, le cercle le plus large, composé de pays les moins avancés, aurait des cibles non globales. Avec le temps, tous les pays se concentreraient dans le centre du plus petit cercle.
La formule n’est peut-être pas exactement ce dont nous avons besoin, mais elle a le mérite de faire parler.
Ce qui fait parler aussi pour la première fois depuis bien longtemps à une conférence des parties, c’est le Canada. Le revirement « fou » de Stephen Harper, hier, lors de la période de questions s’est frayé un chemin jusque dans les bulletins de nouvelles, aujourd’hui. Des délégués de partout dans le monde m’ont demandé si cela était bien vrai. Est-ce qu’il était vrai que notre premier ministre a affirmé au Parlement, justement cette semaine, qu’il serait « fou » de réduire nos gaz à effet de serre dans le secteur pétrolier et gazier? J’ai dû répondre que oui, que c’était bel et bien ce qu’il avait dit.
Demain, nous verrons la pression monter. Le secrétaire d’État américain, John Kerry, devrait venir se joindre à la délégation de son gouvernement. La présidence péruvienne espère pouvoir annoncer que des points de discussion ont été atteints. Je parie que nous ferons des heures supplémentaires.