Hier soir, pendant les deux dernières minutes des débats sur le projet de loi omnibus, j'ai réussi à prononcer le mot de la fin :
Mme Elizabeth May (Saanich—Gulf Islands, PV):
Monsieur le Président, le temps presse, et le débat se clôt beaucoup trop tôt pour ceux parmi nous qui estiment que nous nous apprêtons à commettre une grave erreur que les futurs parlementaires auront peine à corriger.
D'entrée de jeu, permettez-moi de dire aux ministériels et aux députés de ce côté-ci sur quoi nous nous entendons. Comme nous tous, je voterais très volontiers en faveur de la Loi sur la justice pour les victimes d’actes de terrorisme et je voterais pour les modifications proposées à la Loi sur le casier judiciaire afin de remplacer le terme « réhabilitation » par « suspension du casier ». En revanche, je serai forcée de voter contre cette mesure législative si elle s'accompagne de dispositions qui ne causeraient que du tort à notre pays.
J'aimerais dire à tous les députés ministériels dont les réponses préparées les ont systématiquement obligés à faire valoir l'argument selon lequel si l'on met en doute le principe — qui ne tient pas la route, du reste — des peines minimales obligatoires, c'est que l'on prend d'une manière ou d'une autre le parti des criminels au détriment des victimes. Il n'y a rien de plus faux. Des membres de ma famille travaillent dans le milieu de l'application de la loi. Certains de mes proches ont été assassinés. Ce n'est pas parce que l'on reconnaît qu'une mesure législative est si boiteuse que la Chambre devrait voter contre que l'on défend les criminels.
Nous examinons toutes les preuves fournies par les criminologues, pas seulement une ou deux preuves, mais toutes les preuves. Nous examinons les preuves de notre propre ministère de la Justice, qui s'est penché sur la question en 2002. Nous examinons ce qui se passe aux États-Unis, non seulement le fait que les prisons sont pleines à craquer, mais aussi que la population carcérale est majoritairement à faible revenu et noire. Nous analysons également ce qui pourrait se passer dans notre pays. Nous avons consulté le rapport de la Commission royale sur les peuples autochtones ainsi que le rapport de la Commission sur le racisme systémique dans le système de justice pénale de l'Ontario. Nous savons que, si nous n'apportons pas de nombreux amendements à cette mesure législative, nos prisons seront remplies de gens qui ne devraient pas s'y trouver.
Nous savons également que cette mesure législative coûtera des milliards de dollars et que tous les coûts n'ont pas encore été calculés.
Au bout du compte, la mesure législative pourrait en fait donner lieu à des peines moins sévères pour ceux qui mériteraient une peine plus longue, car elle retire aux juges leurs pouvoirs discrétionnaires.